Les protéines sont des nutriments indispensables. Elles ont de nombreuses fonctions clés parmi lesquelles :
Lors de la digestion, une partie des protéines alimentaires est transformée en urée, qui est filtrée par les reins et éliminée dans les urines. Le taux d’urée dans le sang (urémie) est donc le reflet de l’apport alimentaire en protéines et de l’état de la fonction rénale. Une augmentation de l’urémie peut donc suggérer une augmentation de la consommation de protéines alimentaires, ou un défaut d’élimination à cause d’une insuffisance rénale.
Pour éviter l’accumulation d’urée dans le sang et pour limiter le travail de filtration des reins, il est recommandé de contrôler les apports en protéines, voire de les réduire selon la sévérité de l’atteinte rénale. Cela permet également de ralentir la progression de l’insuffisance rénale chronique.
La quantité de protéines journalière doit être adaptée à la fonction rénale ou, plus précisément, au débit de filtration glomérulaire. Celui-ci est déterminée sur la base d’une estimation du débit de filtration glomérulaire (estimé par des équations basées sur la valeur de la créatininémie ou par la mesure de la clairance de la créatinine). Au stade d’insuffisance rénale légère à modérée, les apports en protéines doivent être de 0,8 gramme par kilo de poids corporel et par jour. Ainsi, un individu de 50 kg doit consommer 40 grammes de protéines par jour ; pour 60 kg, 48 grammes ; pour 70 kg, 56 grammes, etc. Attention de ne pas confondre le poids de viande/poisson/œuf et la quantité de protéines pures contenue dans chacun de ces aliments. En effet, ces aliments contiennent, en plus des
protéines, de l’eau et des graisses ; 100 grammes de viande ne contiennent que 20 grammes de protéines pures.
Ainsi, dans le cadre du régime alimentaire de l’insuffisant rénal, la viande (rouge ou blanche), le poisson et les œufs doivent être consommés en alternance, en complément des produits laitiers. Ces aliments sont riches en protéines dites “de haute valeur biologique”, c’est-à-dire qu’elles sont composées de tous les acides aminés essentiels, nécessaires à l’organisme pour synthétiser ses propres protéines. Les protéines végétales issues des légumes secs (lentilles, haricots secs, pois chiches, pois cassés), des fruits oléagineux (noix, noisettes, amandes) et des céréales complètes (riz, blé quinoa) ne peuvent pas remplacer les protéines d’origine animale car biologiquement incomplètes. Il est possible d’en consommer occasionnellement mais en s’assurant de combler le déficit en acides aminés essentiels par la consommation de protéines animales ou d’autre protéines végétales de profil en acides aminés complémentaire.
Dans un passé pas si lointain, on conseillait systématiquement aux patients atteints d’insuffisance rénale chronique, dès le diagnostic, un contrôle strict des apports protéiques afin de ralentir la progression de la maladie. Cependant, des études cliniques ont récemment mis en évidence les risques d’une restriction protéique prolongée, qui peut notamment conduire à un état de dénutrition, caractérisé par une fonte musculaire. Or la dénutrition dans l’insuffisance rénale chronique est fréquente, les patients réduisant souvent spontanément leurs apports protéiques, de façon parfois drastique et proportionnelle à la sévérité de l’atteinte rénale [1].
La dénutrition est associée à la survenue d’une morbidité-mortalité importante au même titre que celle liée aux évènements cardiovasculaires [2]. Limiter l’apport en protéines dans l’insuffisance rénale chronique peut donc être bénéfique sur le pronostic rénal mais délétère sur le pronostic global du patient. Les autorités de santé proposent donc aujourd’hui aux soignants une attitude plus nuancée vis-à-vis des protéines chez leurs patients insuffisants rénaux et recommandent un régime restreint en protéines (0,8 g/kg/j) uniquement à des patients ciblés, jeunes et/ou non dénutris, après une évaluation nutritionnelle multidisciplinaire impliquant un néphrologue et un diététicien.
En comparaison à la restriction protéique, l’effet obtenu par un contrôle strict des facteurs de risque, en particulier l’hypertension artérielle et l’hyperglycémie (diabète), associé à l’effet néphroprotecteur des médicaments de la classe des inhibiteurs de l’enzyme de conversion et des antagonistes des récepteurs de l’angiotensine, est nettement supérieur pour ralentir la progression de l’insuffisance rénale chronique [2]. Ajoutons qu’il peut être également bénéfique aux patients en surcharge pondérale, autre facteur de risque indépendant, de perdre leur excès de poids.