L’asthme est une maladie inflammatoire chronique des voies aériennes qui affectait, selon l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS), 339 millions de personnes dans le monde en 2018. L’obésité, définie par un indice de masse corporelle (IMC) ≥ 30 kg/m2, est également un réel problème de santé publique puisque cette pathologie touche 650 millions de personnes dans le monde et sa prévalence a triplé à l’échelle mondiale depuis 1975. La France est également concernée par “l’épidémie” mondiale de l’obésité. Cette pathologie affecte en effet 6,5 millions de personnes, soit 15 % de la population française, alors même que ce chiffre était autour de 7 % en 1980. L’obésité est considérée comme un facteur de risque majeur à l’origine du développement de nombreuses pathologies, notamment respiratoires telles que l’asthme ou le syndrome d’apnées du sommeil (SAS).
La grande majorité des études cliniques qui ont été réalisées au début des années 2000 font le même constat : les sujets obèses ont un risque de développer un asthme augmenté de 1,6 à 3 selon les études, comparativement aux sujets sans surpoids, et ce, quel que soit le sexe ou l’âge [1].
L’obésité a un effet majeur sur la mécanique ventilatoire [2]. Un problème respiratoire, tel que l’essoufflement, est l’un des premiers signes de l’action de l’obésité sur la respiration. La surcharge pondérale, et surtout l’excès de graisse dans l’abdomen, comprime les poumons dont le volume est par conséquence réduit, empêchant les voies respiratoires de fonctionner de manière optimale.
L’infiltration de graisses dans les poumons et les voies respiratoires entrainerait également une perte d’élasticité du tissu pulmonaire et donc une diminution de la capacité respiratoire [3].
Le tissu adipeux a longtemps été considéré à tort comme un tissu de stockage uniquement. Des études récentes ont pourtant montré que le tissu adipeux jouait un rôle majeur dans le développement de la plupart des maladies chroniques associées à la surcharge pondérale, comme le diabète, l’athérosclérose et l’asthme, en libérant toutes sortes de substances inflammatoires délétères pour tout l’organisme.
Le rôle de l’alimentation est crucial dans le développement de l’obésité, et des données récentes montrent que certains régimes alimentaires, notamment ceux riches en acides gras saturés et pauvres en fruits et légumes sont associés au développement de l’asthme ou à la dégradation de la maladie asthmatique, et ce, indépendamment de la corpulence (déterminée par l’indice de masse corporelle ou IMC).
Comme pour la plupart des maladies chroniques, une prédisposition génétique pourrait en partie expliquer que chez les sujets obèses, à IMC égal, certains développent un asthme et d’autres non.
Par ailleurs, le microbiote intestinal et respiratoire, qui est très impliqué dans les processus inflammatoires, pourrait participer au développement de l’association entre asthme et obésité.
L’asthme et l’obésité partagent des comorbidités communes comme le reflux gastro-œsophagien (RGO) et le syndrome d’apnées du sommeil (SAS). En effet, l’obésité augmente d’un facteur 1,5 à 2 le risque de développer un RGO et est considérée comme un facteur de risque majeur du développement et de la progression du SAS [4].
Les désordres métaboliques doivent également être dépistés compte tenu d’une association significative entre les pathologies métaboliques et l’asthme, en particulier chez le sujet obèse. Le diabète de type 2, l’asthme et l’obésité sont fortement associés à l’âge adulte. Le syndrome métabolique est également un facteur de risque d’asthme.
Les patients asthmatiques obèses ont globalement un asthme moins bien contrôlé que les sujets asthmatiques non obèses et sont également plus à risque d’être hospitalisés pour une exacerbation d’asthme. Cela pourrait provenir en partie d’une résistance des patients obèses aux thérapeutiques habituellement utilisées contre l’asthme. En effet, les sécrétions adipocytaires et l’inflammation qu’elles provoquent inhibent les effets des corticoïdes inhalés et des bronchodilatateurs. Compte tenu d’une efficacité moindre de ces derniers, les interventions non médicamenteuses ont une place majeure dans la prise en charge de ces patients.
La perte de poids a un effet bénéfique sur le contrôle de l’asthme. Elle est également à l’origine d’une diminution des exacerbations, des hospitalisations et d’une amélioration de la qualité de vie des patients.
Dans une étude clinique réalisée chez des patients souffrant d’asthme sévère non contrôlé et d’obésité modérée, la diminution d’un IMC moyen de 40 à 34 kg/m2 améliorait significativement le contrôle de l’asthme et la qualité de vie par comparaison avec les asthmatiques obèses ayant seulement maintenu leur poids [5].
La prise en charge de l’asthme chez la personne en surcharge pondérale est compliquée car doit inclure à la fois un régime diététique amaigrissant, un réentraînement à l’effort et une éducation thérapeutique. Elle doit ainsi, dans l’idéal, être multidisciplinaire impliquant différents professionnels de santé tels que les diététiciens, les kinésithérapeutes et les pneumologues de sorte à favoriser l’adhésion des patients à un tel programme et assurer une perte de poids significative.
Références :
[1] Ford ES. The epidemiology of obesity and asthma. J Allergy Clin Immunol 2005;115(5):897-909
[2] Mahadev S, et al. Obesity, expiratory flow limitation and asthma symptoms. Pulm Pharmacol Ther 2013;26(4):438-43
[3] Elliot JG, et al. Fatty airways: implications for obstructive disease. Eur Respir J. 2019;54(6):1900857
[4] El-Serag H. The association between obesity and GERD: a review of the epidemiological evidence. Dig Dis Sci 2008;53(9):2307-12
[5] Dias-Júnior SA, et al. Effects of weight loss on asthma control in obese patients with severe asthma. Eur Respir J 2014;43(5):1368-77